FABIEN PUJO EN INTERVIEW

F Pujo
4/08/2021

A quelques heures du dernier match de préparation des Diables Noirs, entretien avec Fabien PUJO, entraîneur général de l’USSM

USSM : En 2020-2021, le jeu de l’US Saint Malo était plus spectaculaire, plus séduisant que celui de l’année précédente, mais le résultat n’était pas au bout. Qu’est-ce qui a manqué ?

F.P. : Il a manqué la rage, la volonté extrême, la détermination extrême, le sacrifice, l’envie absolue de gagner. Il a manqué cet « au-delà », le fait d’être habité par l’envie de gagner. Ce qu’on exprimait collectivement était cohérent, mais il nous manquait d’avoir « plus envie de gagner que l’adversaire ». L’illustration la plus éclatante de cela a été notre dernier match, le match en coupe de France contre Saint Brieuc. On avait pourtant énormément travaillé cette dimension. Et puis une erreur, une insuffisance sur coup de pied arrêté… Nous avons pris acte de cette insuffisance et nous avons choisi de recruter des profils caractérisés par cette volonté extrême, cette détermination extrême. C’est le sens de ce grand bouleversement de l’intersaison.

USSM : Y a-t-il déjà des éléments pour laisser penser que la saison 2021/2022 sera plus fructueuse ?

F.P. : On a construit un groupe avec une envie commune de progresser, de souffrir, de gagner des matchs. On le ressent déjà beaucoup plus. C’était attendu, j’ai fait venir des profils qui ont cet ADN. Mais nous allons conserver une grande humilité. Nous sommes au début d’une construction, il est trop tôt pour indiquer quel pourrait être notre classement final. Commençons par le premier match, le 7 aout, travaillons et continuons à travailler. On verra si l’équipe progresse. A l’issue du 1er match amical (l’interview a été réalisée le 16 juillet), on peut se dire que les temps de passage sont bons. Ce que nous avons produit, surtout en 1ère mi-temps, était cohérent. Les joueurs ont vraiment envie de gagner tous les matchs de préparation.

USSM : Vous insistez beaucoup sur l’hygiène de vie des joueurs. Comment peut-on convaincre un joueur de N2 d’une vingtaine d’années, qui est professionnel sans vraiment l’être, d’avoir une hygiène de vie irréprochable ?

F.P. : Ca dépend des profils. Pour certains il faut d’abord éduquer. Expliquer l’importance du sommeil et de la récupération, apprendre à bien manger. Pour d’autres il faut insister sur le risque de blessure et les souffrances qu’elle entraine. C’est un échange, un discours au quotidien. On essaie de prendre des exemples au plus haut niveau. On continue à faire passer des messages réguliers. C’est complexe. Parfois, il faut privilégier l’échange individuel, parfois il faut tenir un discours collectif. Je cherche aussi à engendrer des effets d’entrainement positifs, qu’il y ait une surenchère entre les joueurs en matière de « bonne hygiène ». Qu’ils en parlent entre eux.

USSM : En qualité d’entraineur général, vous supervisez aussi le projet des féminines. Là aussi, l’objectif est ambitieux.

F.P. : Chez les filles, « on n’est pas loin ». Je vois les projets feminin et masculin comme deux formidables locomotives pour tout le club. Et si les filles sont les premières à monter, ce sera un prestige qui peut aider tout le club. Nous essayons de leur faciliter la tâche. Par exemple, nous leur avons fait de la place supplémentaire dans les créneaux d’entrainements sur les terrains. Elles ont vraiment gagné ce droit !

USSM : Est-ce que (un bon parcours en) Coupe de France demeure un véritable objectif pour le club cette année ?

F.P. : Oui. Nous avons décidé de recruter des compétiteurs, donc nous allons jouer à fond la Coupe. La Coupe de France permet d’accélérer un projet d’équipe, grâce aux émotions vécues ensemble. Et même, à partir d’un certain niveau, grâce aux gains financiers obtenus. Nous avons l’ambition de bien figurer. Lorsqu’on a des objectifs élevés, la Coupe de France n’est pas pénalisante, elle est bénéfique.

USSM : Le football a encore évolué en un an. En tant que technicien, quels enseignements tirez-vous de la saison passée et, en particulier, du dernier Euro ?

F.P. : En tant que technicien, ce que je retiens c’est que ce ne sont pas les équipes avec la plus longue liste d’individualités qui ont gagné. En revanche, ceux qui réfléchissent et qui ont un projet cohérent de jeu ont gagné. Il y a 3 ans, après sa non qualification en Coupe du Monde, l’Italie s’est posée les bonnes questions : 1) comment séduire ? 2) comment gagner ? Ils ont construit un projet ambitieux fait de pressing, de mouvement, de qualité technique. L’enseignement à en tirer est qu’il faut parvenir à créer un état d’esprit collectif fort. Du côté de la France, il reste un mystère : comment Didier Deschamps, qui excelle dans le management des joueurs, a-t-il pu échouer de cette manière…

USSM : Vous êtes un très gros travailleur. Vous ne risquez jamais le burn out ?

F.P. : Non parce que ce travail, c’est du plaisir. Je suis focalisé sur l’accession en N1. De plus je suis très frustré de l’achèvement prématuré de la saison dernière. Nous n’avons pas eu le temps de montrer où nous voulions aller. Le seul aspect positif de ce gel des compétitions est que cela m’a donné le temps de mener une forme d’audit de l’organisation sportive. J’ai pu changer un certain nombre de petites choses. Avec un objectif final clair : que ce club devienne, à terme, professionnel.